Faire un Zine photo

Dans l’article d’aujourd’hui, je vais tenter de faire le tour de ce qu’est le zine photo : son but, sa conception, les choses à faire ou à éviter; et je vais vous laisser la place à quelques photographes qui ont sorti ou prévu de sortir des zines, afin qu’ils vous expliquent tant leurs procédés de conception que les projets photographiques qu’ils présentent.

Première chose à faire, trouver une définition du terme « Zine », ici la traduction Wikipedia semble correcte :

Un zine est une œuvre auto-publiée à faible tirage de 
textes et d'images originaux ou appropriés, généralement reproduite via une machine à photocopier.
Les zines sont le produit d'une seule personne ou d'un
très petit groupe, et sont généralement photocopiés en copies physiques pour la circulation. 

Bien évidemment, le zine appliqué à la photographie est rarement photocopié, une qualité d’impression supérieure est préférable.

Pourquoi faire un zine ?

Le zine est un moyen de partager un projet photographique à moindre frais : la production matérielle n’est pas très onéreuse, vous pouvez le faire seul, la conception est relativement rapide, et c’est autrement plus simple que de sortir un livre : ici nul besoin de trouver – ou de se faire trouver par – un éditeur, nul ISBN à enregistrer, rien : on peut s’occuper de toutes les étapes soi-même, des photographies au choix du papier en passant par la maquette.

Le but est donc de montrer son travail, mais à qui ? A ses proches, aux photographes que l’on connait, pourquoi pas lors d’une lecture de portfolio : ici à l’inverse d’un portfolio classique, vous mettez en avant votre talent à dépasser le simple travail d’édition, et à jouer avec le séquençage des images, leurs tailles et les textes qui les accompagnent.

Le résultat est généralement assez compact, le format A5 est très courant et rares sont ceux qui dépassent le A4, le coût est modéré pour l’acquéreur qui ne prend pas un risque énorme.

Comment faire un zine ?

Pour faire un zine photo, il faut deux choses primordiales : des photos et un imprimeur; vous allez voir qu’avec un peu de travail, c’est très accessible.

Les photographies

C’est quand même le point de départ, il vous faut des photographies à montrer, mais lesquelles ? Des zines que j’ai pus voir, ça n’est jamais un best-of du photographe, ou une série de Top-9 Instagram rangés les uns après les autres au fil des pages; beaucoup sont axés sur un projet unique : série de photographies dans un lieu donné, un voyage, un projet photo sur un sujet donné, c’est assez ciblé.

Il faut voir le zine comme un court-métrage, il doit avoir son scénario avec ses temps forts, sa narration, ses propos, et rien n’empêche quelque temps après une première sortie d’en faire un long métrage, une version augmentée ou même un livre.

Là où vous êtes totalement libre, c’est qu’il est possible de faire absolument n’importe quoi, aucun éditeur ne regarde par dessus votre épaule, mais c’est aussi un risque à prendre.

Une fois que vous avez le sujet de votre zine, les photographies, vous pouvez commencer à penser à la confection de l’objet.

L’impression

Il existe des imprimeurs en ligne assez réputés pour sortir les zines, je vais ici en parler de deux assez connus et représentatifs de ce que vous pouvez rencontrer car ils sont bien différents : l’atelier Ooblik, et le service Pixartprinting. Le premier est situé en France, travaille avec des papiers Français de bonne qualité, tout est fait à la main, et la mise en page se fait directement sur le site web. Niveau prise en main du logiciel, c’est simple : on glisse les photos dans la maquette en ligne, on modifie les tailles et on ajoute du texte, et ce que vous voyez à l’écran est imprimé puis envoyé chez vous. C’est rapide et très efficace, j’ai toujours reçu mes commandes en moins d’une semaine. Un carnet A5 de 32 pages, par 25 exemplaires, vous coûtera 13 euros l’unité chez Ooblik, et le prix baissera à 9 euros si vous en prenez 100 ou plus.

Quelques carnets proposés par Ooblik

Le second est situé en Europe (en Italie de mémoire, mais le site web dit « Europe » c’est une filiale de Vistaprint), et les prix sont inférieurs. Tout cela ne se fait pas sans contrepartie : les papiers et impressions sont parfois de moins bonne qualité, et surtout le site demande un certain fichier PDF avec une pagination particulière qu’il faut absolument respecter sinon tout sera décalé, un fonds perdu, une sortie en CMJN avec le profil colorimétrique Fogra 39 et d’autres détails qui compliquent bien l’exercice, surtout quand on est novice. Rassurez vous avec un peu de lecture et en étant méticuleux, j’ai très bien réussi. Pour sortir un PDF comme demandé, il faut un logiciel de mise en page : le plus connu est Indesign d’Adobe, qui est payant, mais il existe des alternatives gratuites suffisantes pour un simple zine photo, j’ai utilisé Scribus, mais Desygner et Canva devraient faire l’affaire également, et pour tous ces logiciels Youtube compte de nombreux tutoriels permettant une prise en main facile.

Chez Pixartprinting les prix sont dégressifs avec le délai de livraison, pour 25 carnets A5 de 32 pages, vous en aurez ici entre 2.20 euros et 3 euros l’unité, et si vous commandez une centaine, vous en aurez entre 1.46 et 1.95 euros l’unité, hors livraison.

Détail de prix chez Pixart


Je ne vous présente ici que deux choix que j’ai moi-même testés, il est évident que je préfère la qualité et l’ergonomie bien plus simple d’Ooblik, mais l’option Pixartprinting peut être intéressante si votre budget est limité et que vous êtes dégourdi avec les outils de mise en page. Ce qui explique la différence de prix est bien sûr la provenance et la qualité des papiers, la main d’œuvre et la taille du prestataire, mais aussi l’attention prêtée au rendu : je sais que chez Ooblik les traceurs (les « grosses imprimantes ») sont très souvent calibrés afin que les couleurs soient régulières et fidèles à vos images, ce qui n’est pas le cas d’autres imprimeurs plus grand-public dont vous pouvez voir fleurir les publicités un peu partout.

Il y a d’autres alternatives en ligne, bien évidemment, mais aussi chez des imprimeurs locaux – cherchez donc « imprimeur » près de chez vous sur Google-Maps, vous verrez qu’il y en a énormément et que certains font du très bon boulot pour des budgets raisonnables, avec l’avantage de pouvoir vous montrer les papiers, discuter du format et de la reliure et pourquoi pas vous montrer des exemples de carnets déjà imprimés.

Avant de commander, vous avez deux solutions : définir une quantité donnée et lancer la commande, au risque de vous retrouver avec des exemplaires sur les bras, ou de ne pas en avoir assez et de devoir réimprimer tout en n’ayant pas bénéficié des meilleurs tarifs, ou lancer votre « campagne de publicité » en amont, faire des précommandes et ensuite lancer la commande avec quelques exemplaires en plus. La première solution est la plus facile pour les flemmards, la seconde la plus raisonnable.

Enfin, il faut calculer le prix de vente en se basant sur la fabrication + l’envoi, qui est une part non-négligeable voire majoritaire de vos frais.

Pour parfaire l’ensemble, libre à vous de trouver une enveloppe assortie, d’y joindre un tirage, des autocollants, de jouer avec des QR codes, mettre du parfum ou du gras de frites si le thème s’y prête, vous êtes libres.

Que faire de votre zine ?

Le voici imprimé et reçu, vous avez déballé un gros carton et vérifié que tout est dans l’ordre, maintenant qu’en faire ?

Si vous le trouvez nul, brûlez-le, mais c’est assez polluant et tant qu’à faire, autant le distribuer. La publicité sur les réseaux sociaux reste assez facile, et si vous avez fait des précommandes, il n’y a plus qu’à envoyer. C’est ici que ça fait très mal, après avoir acheté un paquet d’enveloppes, pour lesquelles je vous conseille de vous rendre dans un magasin de bureautique où c’est pas cher et efficace, il faut tout poster. Déjà, aller à La Poste avec plein d’enveloppes, c’est pas passionnant, mais quand vous voyez que le prix d’un envoi pour un zine A5 en France métropolitaine, c’est 3 euros 96, ça fait mal. Pour les envois à l’étranger, il est possible de tenter d’avoir un prix (largement) inférieur, La Poste ayant une tarification spécifique pour les livres et brochures à caractère culturel; le but étant de faire rayonner la culture française partout. Ainsi, envoyer votre zine de 500 grammes à Ushuaia ou Ushakovskoye ne vous coûtera que 2 euros 60. Toutes les précisions et la tarification sont ici.

Vivre de la vente de zines

Vivre de sa passion est un rêve pour beaucoup, et vendre des zines pourrait être une solution pour gagner un beau salaire en pratiquant la photographie. Mais pour cela il faut en vendre beaucoup, être célèbre, et généralement quand on est célèbre au point de vivre de la vente de zines, on en vit pas : on vit de vendre des tirages, des vrais livres et des masterclass à plusieurs milliers d’euros.

Donc non, n’espérez pas vivre de vos zines, n’espérez même pas dégager de quoi vous acheter plus de quelques kébabs.

Je ne suis peut être pas hyper bon comptable, et il est possible que je n’ai pas tout optimisé, mais je vais vous donner les chiffres de mon dernier zine :

Chez Pixart, 10 zines A5 de 52 pages, 61.02 eur TTC soit environ 6 eur l’unité.
On ajoute un tirage 13×18 sur papier Fine Art que je glisse dedans, qui était un tirage de lecture, soit environ 1 eur l’unité, papier et encre.
Les enveloppes, 25 centimes l’unité de mémoire.
L’envoi, arrondissons à 4 eur.

Chaque zine m’aura coûté un peu plus de 11 eur, et je les ai vendus 10. Mais Pixart m’en a envoyé 15 au lieu de 10 – car j’ai un bonus à vie sur tous mes achat en ligne – ce qui me fait 20 eur de bénéfices et j’en ai gardé deux en souvenir. Sans ce bonus, je les aurais probablement vendus 12 euros l’unité, sans faire plus de bénéfice.

Donc non, il est strictement impossible de vivre de la vente de zines, et il ne faut pas compter dessus pour arrondir vos fins de mois; essayez de rentrer dans vos frais et calculez bien les envois.

Correctif après la parution de l’article et discussion, il est possible de dégager un bénéfice mais pour cela je vous conseille de sortir une quantité certaines de zines, 50 ou 100 permettent de largement baisser les frais de production. Pour l’envoi, aucun miracle malheureusement.

Les photographes et leurs zines

Les zines étant accessibles, c’est un bon moyen d’avoir une collection assez diversifiée de travaux photographiques. C’est aussi un objet spéculatif, imaginez le prix du premier zine de Louis Daguerre aujourd’hui ! Lui n’est pas là pour en parler, mais j’ai proposé à cinq photographes de répondre à mes questions au sujet de leurs zines. Si tous ont en commun d’avoir matérialisé un projet, les expériences diffèrent et les propos retranscrits ici représentent à mon sens un panel assez large, qui pourrait vous inspirer.

Harold Semet – Mornes Plaines

Harold est un photographe belge qui aime capturer sa région.

Peux-tu présenter ton zine, quel est le projet photographique initial, et pourquoi l’avoir publié sous cette forme ?

« Mornes Plaines » est un zine qui traite de la réalité de la ville dans les campagnes du Brabant Wallon, du fait que je m’y ennuyais jusqu’au jour où j’ai eu une moto et puis une voiture. L’idée derrière était aussi de pouvoir présenter le Brabant Wallon comme sujet et non comme décor. Il n’existe pas de bouquins d’art en tant que tel qui traite de ce sujet (il existe pas mal de bouquins mais plus sur le patrimoine et l’histoire). Il est mal représenté en photographie d’art.

cover of Harold's zine "Mornes Plaines"

L’idée du zine est arrivée bien plus tard que l’idée de la série. Au début, c’était juste un projet pour moi même qui ne devait pas spécialement être publié. J’ai fini par le faire car d’autres personnes du Discord (un forum Discord portant sur la photographie. ndr) se sont également lancées dans l’opération et qu’à force de discuter avec elles , j’ai fini par me dire que je devais le faire également . Je me suis dit également que c’était un beau témoignage pour la province où j’ai grandis.

Le format du zine est venu suite a des discussions avec d’autres photographes et du fait que je ne prenais que des photos au moyen format 6×7 , que je voulais optimiser l’espace sans pour autant choisir entre le paysage et le portrait (le zine fait 20×20)

Ce que je voulais trouver dans mon zine, c’est le dépaysement. Donner l’envie aux gens d’aller voir cette région si tranquille, si normale, si banale. J’aime la banalité et finalement c’est un des fils conducteurs du zine. La prochaine étape consistera à le développer et l’améliorer, le compléter et créer un vrai livre d’art.

Quelles difficultés as-tu rencontrées, tant dans la partie technique (mise en page, trouver l’imprimeur, choix du papier) que dans la partie artistique (choix de mettre un texte ou non, disposition des photos..)

J’ai rencontré peu de soucis technique, ce qui me stressais plus c’était de rater ce projet photo, de me décevoir moi même et les gens qui étaient intéressés par le projet. J’ai réalisé le zine avec l’imprimeur Ooblik et ils ont été très enthousiasmés par le projet. Ils ont un éditeur en ligne assez fourni qui m’a permis d’économiser du temps sur la durée. J’ai fait un tirage test qui m’a satisfait et j’ai ensuite préparé les commandes.

Tu as choisi de fonctionner par précommandes, ce que je n’ai jamais fait, après expérience est-ce une solution que tu conseillerais ?

J’ai fait un système de pré-vente où lorsque j’ai atteint la moitié des zines commandés, je passais le bon de commande chez Ooblik, ça m’a permis de ne pas dépenser trop pour l’achat des zines et d’être sûr d’en vendre une bonne partie.

Finalement j’ai vendu tous les zines en une grosse journée (je suis d’ailleurs toujours sur le cul). La vrai galère a été la distribution et le coût d’envoi depuis la Belgique. Mon zine ne rentrant pas dans une format de lettre normalisé, il m’a coûté le double de prévu. Au final sur l’ensemble des zines vendu, je perds malgré tout 150 euros à cause des envois. Je recommande les pré-ventes car cela permet de prendre la température chez les intéressés du zine et ne pas perdre trop d’argent.

Pour finir : Qu’est ce que tu cherches dans un zine en tant que lecteur, et qu’est ce que tu n’aimes pas ?

j’ai pas 150 zines chez moi mais il y a des choses que je n’aime pas : le papier cheap et les textes explicatifs d’images. Ça retire la magie du zine. J’ai envie d’avoir en main une narration photo, pas un texte qui m’explique ce que je dois comprendre ou comment est prise l’image. Le papier ça doit être agréable au touché et à la vue, c’était aussi un de mes objectifs de productions, avoir un chouette papier.

Comme Harold l’a écrit, la première édition de Mornes Plaines est épuisée, mais suivez-le sur Instagram et vous en saurez plus sur ses futurs projets.

Brian Agnès – Lorsqu’ils s’en vont (ce qui demeure)

Brian photographie pour s’occuper l’esprit.

Peux-tu présenter ton zine, quel est le projet photographique initial, et pourquoi l’avoir publié sous cette forme ?

Mon zine est la « consécration » d’une série sur laquelle j’ai travaillé pendant un an et demi. Il est question de l’abandon, la désertion et de ce que deviennent les choses que nous créons/construisons lors que nous nous en allons. Il est tout autant question des bâtiments qui tombent en désuétude parce que leur « destination » ne correspond plus aux usages ou besoins que des êtres aimés qui disparaissent quelle qu’en soit la raison. L’idée du zine est d’avoir un objet fini, concret, en petite édition pour sceller les choses. Il y à je pense l’envie de formaliser un projet, de lui donner vie en dehors d’internet.

J’ai vu que tu as fait un bel effort sur la mise en forme, tout était bien assorti, tu as tout fait seul ou les choix sont issus de concertations ?

Concernant l’editing, Cédric Roux s’est de lui même proposé pour m’aider après que j’ai posté une story sur Instagram. Il m’a aidé à supprimer quelques images en trop, a ordonné plus efficacement les images dans la logique d’un support à feuilleter, chose que je n’avais pas en tête au moment de mon editing. Concernant la mise en page mon zine n’a rien d’extravagant, pas de pleine page, beaucoup d’images sans vis à vis. J’avoue avoir apprécié les mises en page sobre des livres d’Alec Soth ou Joël Sternfeld. Il y a une sorte de rythme lent qui permet au lecteur de bien observer les images avec parfois certains enchaînements logiques et faciles pour accélérer les choses puis retour à des associations moins évidentes pour laisser la place à la réflexion.

As tu eu rencontré des difficultés à certaines étapes, y’a-t-il eu des mauvaises surprises ou des choses que tu ferais autrement ?

Pas de difficultés notables dans la préparation de l’objet en lui même, il y a pas mal d’outils en ligne dont le simulateur d’Ooblik qui permet vraiment de créer une maquette cohérente et facile à visualiser. L’editing a lui été plus délicat en ce qu’il est parfois difficile de se séparer d’images que l’on apprécie mais dont la place ne fait pas sens dans une série. En ce qui concerne les mauvaises surprises, la plus évidente à mes yeux est un aspect « terne » de certaines impressions du zine, sans une bonne luminosité pour le lire il est parfois sombre et les images peu lisibles. Ça passe dans 90% des cas mais quand j’ai ouvert mon exemplaire il était 18h, il faisait nuit et je ne voyais pas grand chose… C’était bien plus agréable une fois place sous un bon éclairage. Après, cela reste un premier zine, il y a des défauts à la série, des points faibles, ce n’est pas à 100% abouti mais il faut je pense relativiser, il faut le prendre comme l’état de ce que l’on est capable de faire à un moment donné de notre parcours et que la suite ne peut qu’être mieux. Pour autant j’ai trouvé les gens bienveillants, assez peu m’ont fait des remarques négatives.

Et pour finir, qu’aimes-tu dans les zines des autres, et que n’aimes tu pas voir dans un zine ?

J’avoue que j’apprécie les zines des autres pour ce qu’ils sont : une entrée dans leur univers, leur sensibilité, leur environnement… J’ai du mal à me positionner clairement sur ce que je n’aime pas parce que globalement soit j’aurais aimé faire les photos que je trouve réussies soit je n’aurais pas aimé faire les photos que je trouve réussies mais qui ne me correspondent pas. Je pense que globalement un zine est l’expression d’une envie de la part d’un photographe, il y met tout son cœur parce qu’il est impliqué dans toutes les étapes de création. Ça ne veut pas dire que j’aime tout mais que potentiellement tout est compréhensible en terme de séries ou photos, il y a une logique en général. Et l’intention est globalement toujours assez bonne et juste pour que le lecteur soit intéressé. Le reste est tellement subjectif.

Vous aimez les photographies de Brian ? Allez le suivre sur Instagram !

Cédric Roux & Philippe Blayo – East / West

Cédric et Philippe sont tous les deux photographes de rue, et aiment les états-unis. En toute logique, ils ont comme projet un zine en duo, de photographie de rue, sur les Etats-Unis.

D’où est né le projet de zine commun, et pourquoi un zine ?

Alors, le projet est né juste après l’exposition que l’on a faite cet été à Arles. Ce projet East/West, on en avait parlé il y a 3 ans autour d’une mousse peu de temps après s’être « découverts ». On a parlé road trip, USA, photos et on s’est dit un peu à la légère, qu’on allait faire un livre de tout cela. Ça a mis le temps et c’est l’opportunité de l’expo qui a matérialisé le projet finalement. Après l’exposition et des retours plutôt cools sur les images, l’idée du zine est venue naturellement pour poursuivre l’expérience. Plus simple à mettre en place qu’un livre ou qu’une expo sur Paris, même si cela fait partie des plans…

Vous avez fait une expo en commun, avec des images de l’Est et de l’Ouest des USA qui se complètent et se renvoient, si le format s’adapte bien à une exposition, est-il applicable à un zine ou pensez vous faire une autre sélection ?

Passer de l’expo au zine, c’est se poser la question de l’angle a adopter. Est-ce le thème qui importe et dans ce cas nous avons tous les deux des images des deux côtés des US. Ou est-ce notre vision qui nous semblait apporter la plus value au thème ? C’est plutôt la deuxième solution qui nous allait. D’autant que notre style est bien marqué. Normalement, on reconnaît tout de suite de qui est l’image. Ça a le mérite de présenter deux versions bien différentes d’un même pays. De présenter des images qui se répondent sans se répéter. Quand on joue sur les analogies ou au contraire les oppositions, on essaie de travailler sur le fond en proposant notre vision de ce qui s’oppose dans ce pays.

Finalement notre travail d’editing a été assez rapide. Nous avons travaillé par duo d’images en isolant quelques images fortes pour rythmer la lecture. On n’a pas peur de faire le tri. On a chacun quelques images qu’on aurait adoré voir dedans mais elles n’avaient finalement pas leur place dans l’ensemble.

Qu’est ce que vous aimez dans les zines en tant que lecteurs, et que n’aimez vous pas ?

Ce qui me plaît dans un zine c’est que c’est une histoire courte. Ça doit me donner envie de dire à l’auteur : t’as pas envie d’en faire un livre ? Ensuite, il y a un côté « collection » qui peut intéresser avec le format quasi standard maintenant. On ne se prend pas la tête avec un zine : on regarde, ça parle, t’as envie d’en voir plus ou plus grand en tirage ou en bouquin…

Sortie prochaine, 200 exemplaires dont des packs limités avec tirage 18*24 sur papier Hahnemühle, format A5. Retrouvez Cédric et Philippe sur Instagram pour en suivre l’avancée.

Retrouvez le zine « Paris libéré » de Cédric chez Bump Books.

Camille Dellerie – Nulle Part

Camille a 35 ans, graphiste 3D d’effets spéciaux et d’animation, il est auteur photographe pour le plaisir.

Peux-tu présenter ton zine, quel est le projet photographique initial, et pourquoi l’avoir publié sous cette forme ?


Mon zine est le résultat final d’un peu plus d’un an à travailler sur mes road-trip avec ma chérie. A la base j’étais inscrit à des cours de tirage de photos et pour une petite exposition de fin d’année sur le thème du mouvement, j’ai eu envie d’explorer photographiquement mes voyages à travers le pays en voiture. A l’issue de l’exposition, j’ai eu envie de continuer un peu pour finir par former le corpus final et, pour marquer la fin, de concrétiser le projet sous la forme d’un objet imprimé. Le zine permet une production à bas coût pour un objet facile à écouler à bas prix pour un photographe pas encore côté (lol).

Zine "Nulle Part" de Camille Dellerie


Je sais que tu es passé par un imprimeur qui a pignon sur rue, est-ce une expérience que tu recommandes ?

Oui et je l’ai encore recommandé sur Twitter il y a peu. J’ai trouvé très enrichissant les diverses interactions avec les imprimeurs. On peut discuter de vive voix du papier, de sa qualité, son grammage, mais aussi se rassurer sur les actions à effectuer pour obtenir un bon tirage.

J’ai même opté pour une dizaine d’euros supplémentaires pour un “Bon A Tirer”. Le BAT ça permet d’avoir un exemple fini pour juger de ses choix et de la qualité avant d’envoyer une commande de plusieurs dizaines. Ils ont été super sympas et m’ont permis de corriger le gamma de mes images sur plusieurs BAT pour le même prix.
Il ne faut pas hésiter à être exigeant.
Je pense qu’à l’avenir je passerai encore par un imprimeur local, mais j’aimerais en trouver un qui propose encore davantage de choix de reliure, papiers et autres effets, pour vraiment avoir le plaisir d’un objet d’artiste, très personnel.
Mais occasionnellement, je passe aussi par des imprimeurs online comme Ooblik ou Matisseo. 

Outre l’envoi, tu as aussi remis ton magazine à une galerie (ça marche comme du dépôt vente je crois ?), quelle expérience en tires-tu ?

Oui, j’ai répondu à un appel d’offre en quelques sortes sur Instagram ou la Yellow Cube Gallery demandait des zines à exposer. J’ai proposé le mien et nous avons pris rendez-vous. Sur place j’ai présenté mon projet et la proprio de la galerie a accepté de m’en prendre 5 dans le cadre d’une exposition sur les frontières.

Là ou j’ai été mitigé, c’est que les choses se sont révélées moins claires que ce que je m’attendais du point de vue financier. La galerie prend un pourcentage sur la vente et s’aligne sur mon prix de vente online. Mais au final je ne m’y retrouve pas. Chaque vente en galerie me coûte un euro. Dans l’absolu, ce n’est pas très grave, je ne fais pas ça pour gagner de l’argent et sur 5 zines on ne parle que de 5 euros. Disons que c’est une première expérience qui me fait comprendre qu’il faut rester vigilant et négocier à chaque étape pour s’y retrouver. Et puis le plaisir d’avoir mon zine dans une petite galerie vaut ce petit sacrifice. Au final, j’ai pu organiser une petite rencontre avec des photographes que l’on fréquente sur Discord et signer quelques exemplaires et ça restera un super souvenir.

Et pour finir, qu’aimes tu dans les zines des autres, et que n’aimes tu pas voir dans un zine ? 


J’aime beaucoup les zines. J’aimais déjà les zines BD. J’en ai fait plusieurs qui ne sont pas centrés sur la photo. C’est un objet très démocratique, je trouve. Il y a quelque chose de très libre, proche du partage, humble, à la portée de tous et qui s’affranchit des barrières de l’édition. Alors, peut être que les zines un peu trop pompeux, les livres d’arts qui se font passer pour des zines en fait, m’agacent un peu.

Dans les zines BD, j’adore quand ça fourmille de dessins et de gags partout, dans les marges, sur la couverture, en surimpression… !  En photo, j’aime quand la sincérité est palpable et qu’on a un petit morceau d’intime confidentiel chez soi.

Quelques derniers exemplaires du la première édition de « Nulle Part » sont disponibles, n’hésitez pas à contacter Camille sur Instagram pour obtenir le votre.

Conclusion

Faire un zine, c’est pas très difficile, ça permet de diffuser ses projets photographiques et n’oblige pas à avoir un corpus de 450 images de par la taille réduite. Je ne peux que vous encourager à vous lancer et à laisser libre cours à votre imagination, le support n’ayant que peu de limites.

Je remercie beaucoup tous les photographes ayant participé à cet article. Certains ont parlé d’un forum Discord traitant de la photographie, en voici le lien : vous pourrez échanger sur votre pratique, parler de cuisine ou de vos pires image.

Et si vous voulez une vidéo vraiment sérieuse, traitant le sujet de A à Z y compris des points que j’ai pu oublier, regardez celle-ci de Paul Napo :

Avec tout ceci vous devez être enfin prêts à sortir votre zine et devenir millionnaire vous aussi.

10 commentaires

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Merci Ritchie pour cet article ; l’idée d’un zine me trotte dans la tête depuis un moment mais j’ose pas ; toutes ces infos participent à me pousser à me remuer… Quant au sujet, définitivement ce sera « life style » car « ça questionne bien » quand même ! Ne tarde pas trop pour le prochain article… tu as des fans !

Hello !

N’hésite pas à te lancer, au pire une petite série, et si ça marche fais en un peu plus ! Mais c’est toujours très cool d’avoir un « produit fini » d’un projet photo !
Un nouvel article est en préparation, ça ne tardera pas trop je l’espère, et ça parlera complètement d’autre chose.

Article très inspirant qui donne envie de se lancer. Cela permet effectivement d’imprimer des séries que l’on aurait pas forcément dédiées à l’impression d’un livre ou d’une expo tout en leur accordant l’impact d’être couchées sur le papier… ou ne serait-ce que pour le coût qui permet plus facilement d’accéder à ce type de réalisation . J’ai beaucoup apprécié les avis complémentaires des différents photographes. Merci beaucoup. Il n’y a plus qu’à s’y mettre. Merci pour cet article.

Et merci à vous pour le travail, bien fait, et de garder une éthique commerciale face aux vagues incessantes du black friday et autres trucs comme ça !
Bonne soirée.

R

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